Petite Anthologie Provisoire

Ediciones Teatro de Ideas, 2012

Selección y traducción
de Jacques Ancet

De Descomposición, Ediciones de la Flor, 1986 (escritos entre 1980/82).

Pandora huele

una palabra
si se guarda mucho tiempo
larga heces
————–materias hirientes
————–al ojo y al oído
humedades
————–hace
sangre por varias de sus partes
no se pudre
dada su condición
de testigo de cargo

pero apesta.

De Décomposition

Pandore sent
un mot
si on le garde longtemps
lâche des fèces
————–matières blessantes
————–à l’oeil et à l’oreille
moiteurs
————–il fait
sang par plusieurs de ses côtés
il ne pourrit pas
vue sa condition
de témoin à charge

mais il empeste

De Cartas, Ediciones de la Flor, 1992 (escritos entre 1990/1992).

Carta XVI
mi querida: los hombres nos envidian el penetrante
juego de intimidades sucesivas: los ensordece
el murmullo de palomas que cambiamos
insomnes y ligeras por sobre toda obligación

envidian la obscenidad de nuestros juegos
contar y llorar como hijas de la misma madre
(que hubiéramos compartido los baños y las camas)
o como madres a punto de parir (casi desnudas
y hablando de un dolor parecido)

los hombres     es sabido      nos envidian
el impenetrable clima de las risas oblicuas
(como de amiguitas a la siesta en el zaguán)
y esa falta de vergüenza al mostrarnos las llagas
o hacerse vestir o acariciar el alma una por otra

ellos no saben cómo hacer para podernos
distraer de nosotras     llamarnos la atención
es su pasión y su calvario: tan fuertes
somos en nuestro pacto el motivo de su deseo

desesperan de nosotras—–pobrecitos
y amados como el otro de nosotras sospechan:
la insuficiencia de ese modo de amar

ellos quisieran ser una más y nos envidian
lo impenetrable (el resto de adolescente que se deja
tocar sin perder nada) ese poder de ubicuidad
que nos concilia con el infierno en un salón del paraíso

en esta lucha por el amor de cada día
ellos no saben de nuestra necesidad y nos envidian
y aunque les juremos que nos son imprescindibles
sabrán que en esa frase hay una trampa:

ser el otro de nosotras es poca cosa
y ellos siempre querrán ser una más

De Lettres

Lettre XVI

Ma chère : les hommes nous envient le jeu pénétrant
d’intimités successives : ils sont assourdis
par le roucoulement de colombes que nous échangeons
insomniaques et légères par-dessus toute contrainte

ils envient l’obscénité de nos jeux
raconter et pleurer comme filles de la même mère
(car nous aurions partagé et les bains et les lits)
ou comme des mères sur le point d’accoucher (presque nues
et parlant d’une douleur semblable)

les hommes c’est connu nous envient
l’impénétrable climat des rires obliques
(comme de petites amies à la sieste dans le vestibule)
et ce manque de pudeur à nous montrer nos plaies
ou nous faire vêtir ou caresser l’âme l’une par l’autre

ils ne savent pas comment faire pour pouvoir nous
distraire de nous-mêmes nous attirer l’attention
c’est leur passion et leur calvaire : nous sommes
si fortes dans notre pacte l’objet de leur désir

ils désespèrent de nous les pauvrets :
aimés comme l’autre de nous-mêmes ils ont des doutes:
l’insuffisance de cette façon d’aimer

ils voudraient en être une encore et nous envient
cet impénétrable (ce reste de l’adolescente qui se laisse
toucher sans rien perdre) ce pouvoir d’ubiquité
qui nous réconcilie avec l’enfer dans un salon du paradis

dans ce combat pour l’amour de chaque jour
ils ignorent notre besoin et nous envient
même si nous leur jurons qu’ils nous sont indispensables
ils sauront que dans cette phrase il y a un piège:

être l’autre de nous-mêmes c’est peu de chose
et toujours ils voudront en être une encore

De Las preguntas, Ediciones de la Flor, 1998 (escritos entre 1992/98).

4-
¿girando detrás de un pensamiento
como una perra que muerde su cola
algo del pensamiento se hará claro y potente
como un ladrido o un celo de animal?

¿algo de la perra que hay en mí
dejará de girar detrás de sí dejará
de morder de hacerse daño
si esa luz hace claridad?

¿girar no es una gimnasia ridícula
que saca de lugar confunde
cielo y suelo y vuelve
cada cosa algo que se mueve
y algo que se deja de ver?
¿es posible así entender algo?

¿habrá que tener un pensamiento de perra
para hacer una pregunta donde se vea
cómo una mujer muerde el hueso
tras una idea de mujer
y eso la lleva—–a ver con otra claridad?

De Les questions

4-

tournant derrière une pensée
comme une chienne qui se mord la queue
un peu de cette pensée deviendra-t-il clair et puissant
comme un aboiement ou un rut d’animal ?

ce peu de la chienne que j’ai en moi
cessera-t-il de tourner derrière lui cessera-t-il
de mordre de se faire mal
si cette lumière fait la clarté?

tourner n’est-ce pas une gymnastique ridicule
qui déplace confond
ciel et terre et fait de
chaque chose ce peu qui bouge
et ce peu qu’on cesse de voir ?

est-il possible ainsi de comprendre un peu ?

faudra-t-il avoir une pensée de chienne
pour poser une question où l’on voie
comment une femme ronge son os
derrière une idée de femme
et cela l’amène-t-elle à voir avec une autre clarté ?